Lorsque le salarié en arrêt maladie demande lui-même d’être reconnu inapte...
jeudi 27 juillet 2023 - ◷ 4 min
Par cet arrêt en date du 24 mai 2023, la Cour de cassation tranche la question relative à l’inaptitude, notamment lorsque le salarié est lui-même à l’origine de la demande...
JURISPRUDENCE SOCIALE
A propos de l’arrêt de la Cour de cassation du 24 mai 2023, n° 22-10.517
https://www.courdecassation.fr/decision/646daae9682126d0f8fac944
° DECISION DU JUGE
Il résulte de la combinaison des articles L. 4624-4 et R. 4624-34 du code du travail, dans leur rédaction issue du décret du 27 décembre 2016 que le médecin du travail peut constater l’inaptitude d’un salarié à son poste à l’occasion d’un examen réalisé à la demande de celui-ci, sur le fondement de l’article R. 4624-34, peu important que l’examen médical ait lieu pendant la suspension du contrat de travail.
° FAITS
Un travailleur, recruté en tant que soudeur le 2 mai 1997 au sein d’une société, puis d’une autre par le biais d’un plan de cession totale en 2017 : il a été placé en arrêt maladie le 2 novembre 2017, sollicite un examen médical au terme duquel le médecin du travail l’a déclaré inapte le 13 novembre. Un mois après, en décembre, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Il a saisi le Conseil de prud’hommes de demandes relatives à la rupture de son contrat de travail...
° PROCEDURE
La Cour d’appel de Metz l’a débouté de l’ensemble de ses demandes dans un arrêt du 20 avril 2021 et a jugé son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Le salarié a saisi la Cour de cassation car selon lui, son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse car le médecin du travail ne pouvait pas le déclarer inapte pendant son arrêt de travail.
La question qui se pose dans ce cas est de savoir si l’inaptitude du salarié peut être prononcée suite à une visite médicale qu’il a lui-même souhaité organiser pendant un arrêt de travail.
° ECLAIRAGES
Le médecin du travail qui constate, conformément à l’article L. 4624-4, qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé du travailleur justifie un changement de poste déclare le travailleur inapte à son poste de travail.
De plus, le médecin du travail peut constater l’inaptitude d’un salarié à son poste à l’occasion d’un examen réalisé à la demande de ce dernier sur le fondement de l’art. R. 4624-34, peu important que l’examen médical ait lieu pendant la suspension du contrat de travail.
En l’espèce, dans l’avis d’inaptitude établi le 14 novembre 2017, le médecin du travail a visé l’art. R. 4624-34, pour la visite et, l’article L. 4624-4, pour l’avis d’inaptitude lui-même. Cet avis mentionne que le salarié a été déclaré inapte après une visite médicale qui s’est tenue le 13 novembre 2017, suivie d’une étude de poste et des conditions de travail et d’un échange avec l’employeur menés par le médecin du travail et que la dernière actualisation de la fiche d’entreprise a pour date le 24 avril 2015.
La Cour d’appel a donc fait une bonne application des textes sur ce point, et le pourvoi du salarié a été rejeté.
° FONDEMENTS JURIDIQUES
Les deux principaux articles sur lesquels se base la Cour pour rendre cette décision sont les articles R. 4624-34 du Code du travail, qui prévoit le cadre de la visite médicale, ainsi que l’article L. 4624-4 du même code qui prévoit la constatation de l’inaptitude par le médecin du travail, après une étude de poste et un échange avec l’employeur.
° DROIT EN ACTIONS
La Cour de cassation avait déjà admis la possibilité d’un constat d’inaptitude au cours d’un arrêt de travail, dans un cas où le premier des deux examens médicaux nécessaires au constat de l’inaptitude avait été pratiqué pendant la prolongation d’un arrêt maladie (Cass. soc, 20 novembre 2013 n° 12-17.753). Mais, depuis le 1er janvier 2017, le salarié peut être déclaré inapte à l’issue d’une seule visite médicale.
Auteur, Louis BERVICK, juriste en droit social, Pôle Service Juridique, Secteur Juridique National.