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Employeurs, l’obligation de neutralité pour les élections professionnelles n’est pas optionnelle ! L’UNSA veille au grain...

samedi 4 juin 2022 - ◷ 4 min

Le manquement de l’employeur à son obligation de neutralité est à lui seul un motif d’annulation des élections… si tant est que celui qui invoque ce manquement en rapporte la preuve.

JURISPRUDENCE SOCIALE

Cass., soc., 18 mai 2022, n°20-21.529
https://www.courdecassation.fr/deci...

QUEL PRINCIPE ?

L’employeur est tenu à une obligation de stricte neutralité vis-à-vis des candidatures et syndicats. Il ne peut à se titre être partie prenante des élections professionnelles, en dehors du champ légal. ll ne peut davantage influencer d’une quelconque façon les opérations électorales.

QUELLES CONSEQUENCES ?

A défaut de "neutralité", son action sera considérée comme une violation majeure d’un principe générale du droit électoral.

Une annulation automatique des élections professionnelles, bien sûr, si la preuve d’un manquement avéré est rapportée.

LA DECISION DE JUSTICE ET SON CONTEXTE

Dans l’affaire ayant donné lieu au litige, la CFTC a déposé une liste par mail 16 minutes après expiration du délai fixé par le protocole d’accord préélectoral. En conséquence de quoi, l’employeur a refusé la liste.
L’histoire aurait pu en rester là, sauf qu’il a été constaté que FO avait déposé une liste en main propre le même jour mais sans qu’aucun horaire ne soit précisé.

La CFTC en conclut qu’il y a manquement à l’obligation de neutralité et demande l’annulation des élections.

RAISONNEMENT DES JUGES ET DE LA COUR DE CASSATION

Les juges du fond ont considéré dans cette affaire que le flou résultant de l’impossible vérification de l’horaire de dépôt s’apparentait à un manquement à l’obligation de neutralité de l’employer, la Cour de cassation aura une toute autre analyse.

Elle va en effet considérer qu’il appartient à celui qui invoque la violation par l’employeur de son obligation d’en rapporter la preuve. Ainsi donc, exiger de l’employeur qu’il apporte la démonstration d’un manquement à son obligation de neutralité en cas de simple suspicion reviendrait à inverser la charge de la preuve. La décision des juges du fond ayant décidé le contraire entrainait la cassation.

ECLAIRAGES

La position de la Cour de cassation n’est pourtant pas exempte de critique.

Il est communément admis en droit du travail qu’il appartient à la partie salariée d’apporter des éléments suffisants laissant supposer un manquement de l’employeur à ses obligations.
Selon cette logique, si des éléments suffisamment concordant permettent de laisser planer un doute sur un manquement de l’employeur, il lui appartient alors d’apporter la preuve de son respect. Ceci pour une bonne raison. L’employeur est généralement le seul à disposer des moyens matériels et humains pour mettre en œuvre et apporter la démonstration du respect des obligations légales lui incombant.

Dans l’affaire qui nous occupe, deux procédés de dépôts de liste distincts ont été mis en place. Le dépôt électronique permettant l’identification certaine des date et horaire de dépôt de liste et le dépôt en main propre. Sauf que dans ce dernier cas seule la date n’a pu être certifiée à l’exclusion de l’horaire.

Il eut été aisé pour l’employeur de certifier l’horaire de dépôt. Le manquement à cette inscription élémentaire et égalitaire pouvait s’analyser comme mettant en doute la neutralité de l’employeur.

Quand bien même un horaire aurait été inscrit, si l’employeur souhaitait favoriser le syndicat retardataire, il aurait pu falsifier l’horaire. Mais, si l’on admet ce raisonnement, alors on ouvre la voie à la contestation de toutes les listes remises en main propre contre décharges. Et, l’employeur ne pourra à aucun moment apporter la preuve du respect de son obligation ce qui entraînerait l’annulation systématique des élections.
Pour démontrer le manquement de l’employeur à son obligation de neutralité sur ce fondement, il faut des éléments de flagrance.

En clair, si le syndicat veulent écarter tout risque et sécuriser le processus, il leur appartient d’inscrire dans le protocole d’accord préélectoral que le dépôt de listes ne doit se faire que par voie dématérialisée ou par toute autre forme permettant une traçabilité "timée" du dépôt de listes... A vos montres, déposez !

Auteur Michel PEPIN, juriste, Pôle service juridique du Secteur Juridique National de l’UNSA.
Pour tous commentaires ou question, juridique@unsa.org

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